Le Gouvernement fait appel aux agents immobiliers dans la lutte contre le blanchiment de capitaux

Le Gouvernement intensifie la lutte contre le blanchiment de capitaux. Depuis le 1er septembre 2013, il fait également appel aux agents immobiliers. Le Règlement anti-blanchiment rédigé par l'Institut professionnel des agents immobiliers lui-même vient ainsi d'être ratifié par arrêté royal. Les agents immobiliers devront désormais identifier leurs clients et signaler les éventuelles irrégularités à la Cellule de traitement des informations financières (CTIF).

Les obligations de vigilance à l'égard de la clientèle doivent conduire à une identification correcte des clients potentiels

Depuis le 1er septembre 2013, les agents immobiliers sont tenus, avant de nouer une relation avec un client, de constater et de vérifier l'identité de ce client (et/ou de son mandataire). Le terme de client désigne en l'occurrence aussi bien l'acheteur que le vendeur du bien immobilier, et certainement aussi l'ayant droit économique.

L'identification doit avoir lieu:

avant que le client potentiel ne devienne un client habituel;

avant que le client ne réalise une (ou plusieurs) opération(s) (liées) pour un montant de 10.000 EUR ou plus;

lorsque l'agent immobilier soupçonne qu'une personne se livre à des activités de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme;

lorsque l'agent immobilier soupçonne que les données qui lui ont été communiquées ne sont pas correctes et qu'il a des doutes quant au fait que la personne identifiée est bien celle qui veut réaliser l'opération.

La méthode d'identification (les pièces justificatives nécessaires) varie en fonction de la qualité du client: personne physique, personne morale, entité dénuée de la personnalité juridique, groupe de clients en indivision (plusieurs personnes qui détiennent ensemble un seul et même bien immobilier, par exemple, les enfants qui ont hérité ensemble de la maison de leurs parents).

Le Gouvernement attend de l'agent immobilier qu'il joue un rôle plus actif dans la lutte contre le blanchiment: s'il a des doutes concernant les données qui lui ont été communiquées, il doit entreprendre les démarches nécessaires pour pouvoir constater l'identité de l'ayant droit économique. S'il a des raisons de croire que les informations incorrectes lui ont été communiquées délibérément dans le but de dissimuler la véritable identité de l'ayant droit économique, l'agent immobilier doit refuser de nouer une relation d'affaires avec cette personne et, le cas échéant, signaler l'incident à la CTIF.

Depuis le 1er septembre, les agents immobiliers sont tenus d'appliquer cette méthode d'identification à tous leurs nouveaux clients. Ils sont également tenus d'identifier leurs clients existants (avec lesquels ils entretenaient déjà une 'relation d'affaires' au 1er septembre) dans un délai raisonnable, fixé à neuf mois. Ils ont donc jusqu'au 1er juin 2014 pour le faire.

La 'politique d'acceptation des clients': avec qui nouer une relation d'affaires

Chaque client a un certain profil de risque. Différents éléments jouent un rôle à cet égard : le type de client (personne physique ou personne morale), le pays d'origine, le type d'opération...

L'agent immobilier a jusqu'au 1er juin 2014 au plus tard pour élaborer une politique d'acceptation des clients, en application de laquelle il pourra décider de nouer ou non une relation d'affaires avec un client potentiel. Plus le profil de risque du client potentiel est élevé, plus l'agent immobilier devra prendre de précautions, par exemple, rechercher davantage d'informations sur le client, demander l'autorisation du responsable du bureau...

Certaines opérations sont réputées comporter un risque accru:

vente/achat d'un bien immobilier à un prix beaucoup trop bas;

investissements importants par des personnes établies dans un pays qui ne coopère pas à la lutte internationale contre le blanchiment de capitaux;

opérations pour le compte de personnes politiquement exposées et les membres de leur famille qui vivent à l'étranger;

opérations avec des ASBL ou des sociétés étrangères sans but lucratif.

Quelles sont les autres obligations incombant à l'agent immobilier?

L'identification des clients et l'élaboration d'une politique d'acceptation des clients sont les principales obligations du règlement. Mais le règlement impose également plusieurs autres obligations aux agents immobiliers:

obligation d'archivage: conserver les documents relatifs à l'identification du client et aux opérations réalisées jusqu'à cinq ans après la fin du contrat;

établissement d'un rapport écrit: rédiger un rapport écrit concernant toute opération à risque (particulièrement sensible au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme) et le mettre à la disposition du SPF Economie s'il le demande;

formation et information du personnel concernant la réglementation en matière de blanchiment de capitaux;

désignation d'un responsable anti-blanchiment pour le bureau;

obligation de déclaration envers la CTIF. Devoir de discrétion à l'égard des clients qui ne peuvent être informés que la CTIF a reçu des informations à leur sujet et qu'une information du chef de blanchiment les concernant risque d'être ouverte;

autoriser les fonctionnaires du contrôle du SPF Economie et les officiers de police judiciaire à pénétrer dans les lieux de travail pendant les heures d'ouverture (habituelles) pour leur permettre d'exercer leur compétence de contrôle.

Paiements en espèces

Les paiements en espèces sont également de plus en plus réglementés. Jusqu'au 31 décembre 2013, le prix de vente d'un bien immobilier pourra continuer à être acquitté partiellement en espèces, à concurrence de 10 % maximum et avec un maximum absolu de 5.000 EUR. Cela vaut non seulement pour le prix de vente du bien, mais aussi pour la commission de l'agent immobilier.

A partir du 1er janvier 2014, toute transaction immobilière devra être réglée par virement ou par chèque. L'agent immobilier devra signaler toute infraction à cette règle à la CTIF. Il appartiendra ensuite à la CTIF de pousser les investigations plus loin.

Nota Bene

D'autres catégories professionnelles, tels les avocats, les notaires, les réviseurs d'entreprises et les institutions financières, se voient également imposer des obligations similaires dans le cadre de la lutte contre le blanchiment.