Planification successorale: sauter une génération = payer moins de droits de succession

Le but de la planification successorale est de payer le moins de droits de succession possible. Pour ce faire, il existe plusieurs techniques. L'une d'elles consiste à faire en sorte que les mêmes biens ne soient pas transmis deux fois, mais bien une seule, à une autre génération: vous pouvez, par exemple, léguer votre patrimoine directement à vos petits-enfants. Autrement dit, vous sautez une génération, ce qui explique que cette technique soit également qualifiée de 'generation skipping'.

Sans planification successorale: les biens sont transmis par héritage deux fois

Si vous n'entreprenez aucune démarche, le droit successoral légal s'applique. Cela signifie que vos enfants sont vos héritiers et que vos petits-enfants sont les héritiers de vos enfants. Votre patrimoine n'est donc transmis à vos petits-enfants qu'en deux étapes: votre patrimoine va d'abord à vos enfants (à votre décès) avant d'aller à vos petits-enfants (au décès de vos enfants).

Le patrimoine change deux fois de propriétaire. A chaque changement de propriétaire, il y a des droits de succession à payer. En Belgique, les droits de succession sont calculés de manière progressive: plus vous héritez, plus le tarif appliqué sera élevé et plus vous payerez d'impôt. Le degré de parenté influence lui aussi le tarif. Les tarifs les plus avantageux sont ceux entre époux et entre (grands-)parents et (petits-)enfants.

Dans le chef des (petits-)enfants, la succession est d'abord scindée en biens mobiliers et biens immobiliers. La succession est ensuite partagée entre les enfants et l'impôt à payer est calculé par enfant. (Nota bene: dans les chefs des neveux et nièces, par contre, l'impôt est d'abord calculé, après quoi la succession est partagée entre tous les héritiers. Ils héritent donc ensemble, de sorte que non seulement ils paient un tarif plus élevé, mais qu'en plus, ils se retrouvent plus rapidement dans une tranche d'imposition plus élevée).

Léguer directement aux petits-enfants: possible, mais seulement à concurrence de la quotité disponible

La planification successorale permet, par exemple, de léguer une partie de son patrimoine directement à ses petits-enfants.

Attention: les enfants sont des héritiers réservataires. Cela signifie qu'ils ne peuvent jamais être complètement déshérités. Ils ont toujours droit à une réserve. L'importance de cette réserve dépend du nombre d'enfants: (i) s'il n'y a qu'un seul enfant, la réserve est égale à la moitié de l'héritage et l'autre moitié peut être partagée librement, (ii) s'il y a deux enfants, la réserve est égale à deux tiers, ce qui signifie que chaque enfant a droit à un tiers de l'héritage et que le dernier tiers peut être partagé librement, (iii) s'il y a trois enfants, la réserve est de trois quarts et chaque enfant a droit à un quart de l'héritage, le quart restant constitue alors la quotité disponible.

Cela pose surtout problème si l'héritier réservataire réclame son dû. Pour une bonne planification successorale, mieux vaut y associer toutes les parties (enfants et petits-enfants). Si vos enfants sont d'accord que vous sautiez une génération, vous pouvez, dans la pratique, donner plus à vos petits-enfants que la quotité disponible. Vous savez en effet que vos enfants ne réclameront pas leur quotité réservataire au détriment de leurs enfants.

Léguer directement aux petits-enfants: plus d'héritiers, tarif plus faible

Un premier avantage est que la plupart des gens ont plus de petits-enfants que d'enfants. La succession est donc partagée entre un nombre plus élevé de personnes. Chacun hérite donc d'un peu moins, mais se retrouve de ce fait dans une tranche d'imposition plus faible et paie donc moins d'impôt.

Exemple

Monsieur Peters a trois enfants et huit petits-enfants. Il peut disposer librement de 288.000 euros de biens mobiliers (argent sur des comptes).

Il lègue l'argent à ses trois enfants: chaque enfant recueille 96.000 euros et paie 1.500 euros de droits de succession dessus (= 3 % sur les premiers 50.000 euros) + 4.140 euros (9 % sur les 46.000 euros suivants) = 5.640 euros par enfant. Les trois enfants paient ensemble 16.920 euros de droits de succession;

Il lègue l'argent à ses huit petits-enfants: chacun recueille 36.000 euros et paie 1.080 euros de droits de succession dessus (= 3 % sur 36.000 euros, le tout dans la première tranche). Les huit petits-enfants paient ensemble 8 × 1.080 euros = 8.640 euros de droits de succession;

résultat: en léguant son argent directement à ses petits-enfants, il permet à sa famille d'économiser plus de 8.000 euros d'impôt. Et plus la somme qu'il lègue est importante, plus la différence sera importante.

Léguer directement aux petits-enfants: un seul changement de propriétaire et donc une seule fois des droits de succession à payer

Un autre avantage est qu'il ne faut payer qu'une seule fois des droits de succession. Si vous ne faites rien, vos enfants et petits-enfants devront passer deux fois à la caisse. Le patrimoine sera en effet transmis deux fois. Vos enfants paient sur la part qu'ils héritent de vous, après quoi vos petits-enfants paieront sur la part qu'ils hériteront de leurs parents.

Exemple

Madame Van den Eynde lègue 150.000 euros à son fils, qui paie alors 1.500 euros (3 % sur les premiers 50.000 euros) + 9.000 euros (9 % sur les 100.000 euros suivants) = 10.500 euros de droits de succession. Son fils décède quelque temps plus tard et lègue la même somme (150.000 euros) à sa fille unique, qui paie alors 10.500 euros de droits de succession (la même somme est donc soumise une deuxième fois aux droits de succession). Le patrimoine a en effet été transmis deux fois à la génération suivante. Si madame Van den Eynde avait légué son argent directement à sa petite fille, les 10.500 euros de droits de succession n'auraient dû être payés qu'une seule fois au lieu de deux.

Nota bene

Bien que les exemples ci-dessus concernent la Région flamande, le même raisonnement s'applique aux habitants des autres régions (Région wallonne et Région de Bruxelles-Capitale): ils économiseront eux aussi des droits de succession en sautant une génération. Le montant exact qu'ils économiseront sera évidemment différent, puisque les tarifs applicables varient d'une Région à l'autre.